Photographier la Voie lactée

Photographier les objets célestes est réellement passionnant et vu que cette discipline intéresse beaucoup de monde ces derniers temps, j’ai décidé d’écrire ce petit tutoriel sur les bases de l’astrophotographie. Dans cet article, on va se concentrer sur les conditions, le matériel et la technique nécessaire pour photographier la Voie lactée, dans le prochain billet, nous verrons comment traiter les fichiers RAW. Avant de lire la suite, vous devez absolument comprendre et maîtriser l'exposition.  

 

Matériel

Avant de vous lancer, il faudra tout de même disposer d’un peu de matériel :

  • Un appareil photo doté d’un capteur micro 4/3 au minimum (c’est-à-dire tous les appareils photo à objectifs interchangeables).

  • Un trépied (même un Gorillapod peut suffire)

  • L’objectif le plus lumineux dont vous disposez (c’est-à-dire avec la plus grande ouverture). Pour commencer je vous conseille d'utiliser des objectifs grand angles, mais vous pouvez par la suite faire des photos de la Voie lactée avec un 24, 35 ou 50 mm en faisant des panoramas.

  • Si possible, un pare-soleil qui servira ici de pare-buée

  • Si possible, une télécommande supportant le mode BULB (si vous n’en avez pas, pas de problème, on peut faire sans !)

  • Une lampe frontale

  • Une ou des batteries bien chargées !

  • Du café ou du thé :D

 

Météo

Avant de sortir, si vous avez devant vous un ciel totalement couvert, vous ne pourrez, bien évidemment, pas prendre en photo les étoiles. Ceci étant dit, si vous voyez seulement quelques nuages, vous pouvez tenter le coup (ils peuvent même rendre vos images plus intéressantes !).

Pour vous aider, en plus des prévisions météo, vous pouvez utiliser de l’imagerie satellite pour regarder les mouvements des nuages :

Vous pouvez également utiliser l’excellente carte animée du site ventusky :

Pollution lumineuse

La lumière émise par nos villes et villages sera visible sur vos photographies du ciel nocturne. Il faut donc s’éloigner, si possible, des grandes villes. Personnellement, je trouve qu’un peu de pollution lumineuse peut parfois embellir nos images, mais les puristes ne seront sans doute pas d’accord (N’essayez pas de photographier les étoiles en plein Paris pour autant !). Pour vous aider à trouver des endroits adaptés à l'astrophotographie, je vous mets en lien une carte de la pollution lumineuse

Pollution (particules fines)

La pollution peut également poser des problèmes, notamment les particules fines qui, dans certaines conditions, forment un voile qui recouvre le ciel et réduit la qualité des clichés. Il y également une carte sur le site meteociel pour mesurer la présence de cette pollution.

Lune

La lune reflète énormément de lumière du soleil et doit être considéré comme une source importante de pollution lumineuse. Dans l’idéal, il faut photographier le ciel quand elle n’est pas levée. Je vous conseille d’utiliser un calendrier lunaire pour savoir à quels moment du mois vous pouvez photographier la Voie lactée, personnellement j’utilise l’application PhotoPills qui est très pratique.

Carte du ciel nocturne 

Enfin, il faut noter qu’en fonction du pays et du moment de l’année, différentes parties de la Voie lactée seront visibles. Pour vous aider à vous repérer, vous pouvez utiliser l’excellent Stellarium. La version mobile est payante, mais l’application PC est gratuite.


Réglages

a) Mode et longueur focale

Pour capter la lumière des étoiles, il va falloir utiliser des réglages particuliers sur votre appareil. Tout d’abord, mettez votre APN (appareil photo numérique) en mode manuel et réglez votre objectif sur son plus grand-angle (18 mm si vous utilisez un 18-55).

b) Vibrations

Je vous conseille d’utiliser votre télécommande ou de mettre un retardataire de deux secondes, ainsi vous éviterez de faire vibrer votre appareil en appuyant sur le déclencheur ; pensez également à désactiver la stabilisation de votre appareil ou objectif. Si vous utilisez un reflex, vous pouvez aussi utiliser le verrouillage du miroir pour réduire davantage les vibrations ; quand ce mode est activé, un premier appuie sur le déclencheur lève le miroir et il faut appuyer une deuxième fois pour prendre la photo.

Astuce 1 : chez Canon, si vous activez le retardateur 2s en même temps que le verrouillage du miroir, l’appareil prendra automatiquement la photo deux secondes après avoir levé le miroir. Pratique !

Astuce 2 : si vous mettez votre appareil en mode liveview, le miroir sera levé au moment de déclencher.

c) Ouverture

On utilise généralement l’ouverture maximale de son objectif pour récupérer le plus de lumière possible, mais certains objectifs ont une mauvaise qualité optique à pleine ouverture et il faut donc les refermer d’un stop et parfois même plus.

d)  Vitesse d’obturation et règle des 500

Concernant la vitesse d’obturation, il faut la calculer en utilisant la règle des 500. Pas de panique ! C’est très simple :)

En effet, notre planète tourne sur elle-même et si l’on utilise un temps de pose trop long, les étoiles ressembleront à des filets (ce qui peut être très esthétiques, mais ce n’est pas notre but ici).

Note : on appelle une photo où l’on produit volontairement des longs filés d’étoile, une photographie circumpolaire.

Le calcul de base est 500/longueur focale = temps de pose maximal en secondes

Cependant, il varie selon la taille du capteur de votre appareil :

  • Sur Full Frame : 500/longueur focale

  • Sur APS-C Nikon, Sony, Pentax et Fujifilm : 500 / (longueur focale X 1.5)

  • Sur APS-C Canon : 500 / (longueur focale X 1.6)

  • Sur Micro 4/3 : 500 / (longueur focale X 2)

Exemple concret : j’utilise un Canon 6D (capteur Full Frame) avec un objectif 17 mm, je divise donc 500 par 17 ce qui me donne 29.4, je sais donc que ma vitesse d’obturation doit être d’environ 30 secondes. Si j'utilise un temps de pose encore plus long, les étoiles vont ressembler à des traits.

Si je décide d’utiliser mon Canon 550D (capteur APS-C) avec mon 18-55, je dois diviser 500 par 18 X 1.6 ce qui me donne 17.36, ma vitesse d’obturation doit être d’environ 17 secondes.

À noter que si vous souhaitez utiliser des temps de pose supérieur à 30 secondes, vous devrez vous équiper d'une télécommande afin d'utiliser le mode BULB.

Il faut également savoir que la règle des 500 est approximative puisqu’elle ne prend pas en compte certaines données telles que la définition du capteur et la distorsion de l'objectif, mais lorsque vous débutez en astrophotographie, c'est un bon moyen de savoir facilement quelle vitesse d'obturation utiliser.

Note : si l’astrophotographie vous plait et que vous décidez d’investir dans du matériel pour améliorer la qualité de vos clichés, sachez qu’il existe des petits boitiers motorisés que l’on appelle des montures équatoriales. Ils compensent pour la rotation terrestre et vous permettent donc de faire des poses bien plus longues sans filés. Il s’agit du meilleur achat que vous pouvez faire pour améliorer la qualité de vos clichés d’astro.

e) Sensibilité ISO

La sensibilité doit être relativement élevée, généralement entre 1600 et 6400, sans quoi, vous ne verrez rien ! L'idéal est de régler sa sensibilité ISO en fonction de sa vitesse d'obturation et de l'ouverture de son objectif ; par exemple, si vous disposez d'un Samyang 24 mm f/1.4 vous pourrez utiliser une sensibilité bien plus basse qu'avec un 18-55 ou un 24-70 f/4 (pour calculer précisément la sensibilité par rapport aux autres paramètres vous pouvez lire mon article sur l'indice de lumination et la correction d'exposition). 

Pour avoir plus d’informations sur la sensibilité ISO et apprendre à l’utiliser de manière optimale, je vous invite à lire mon article sur l’ISO variance (Attention : niveau avancé !).

f) La mise au point

Le but ici va être de faire une mise au point sur l’infini, malheureusement pour nous, on ne voit rien ! On oublie donc le système autofocus qui ne peut fonctionner dans ces conditions et l'on passe à la mise au point manuelle. Il faut maintenant se mettre en liveview (prise de vue avec l’écran LCD arrière), faire un zoom numérique 10 X et repérer une étoile lumineuse, visez celle-ci et faite votre mise au point. 

Quelques astuces pour la mise au point : 

  1. Vous pourriez être tenté d’utiliser l’indicateur de mise au point sur l’infini inscrit sur votre objectif, mais celui-ci n’est généralement pas très précis et il vaut mieux ne pas se baser là-dessus.

  2. Si vous utilisez un appareil ancien qui ne permets pas de faire de prise de vue en liveview, vous pouvez faire la mise au point au préalable sur un objet distant tel qu'un nuage.

  3. Si vous prenez vos photos avec une objectif disposant d'une très grande ouverture (f/1.4, f/2, etc.), il est parfois plus simple de refermer un peu le diaphragme et de faire la mise au point tout en maintenant le bouton de contrôle de la profondeur de champ.

g) La réduction de bruit pour les expositions longues

Cette fonctionnalité existe sur la majorité des APN et fonctionne même lorsque vous shootez en RAW. Il sert à traiter le bruit thermique et plus précisément les pixels chauds de votre capteur qui apparaissent lors des poses longues. Pour ce faire, après chaque prise de vue, votre appareil prend une deuxième photo avec l’obturateur fermé, il combine ensuite les deux clichés afin de supprimer les pixels chauds. Le problème est que Lightroom et Camera RAW éliminent automatiquement les pixels chauds de tous les fichiers qu’ils ouvrent ce qui rend cette fonctionnalité pratiquement inutile. De plus, l’utiliser comporte plusieurs inconvénients :

  • Cette fonctionnalité dégrade légèrement la qualité de vos images (c’est d’ailleurs écrit dans le manuel de votre appareil photo)

  • Le fait de doubler le temps d’exposition fera chauffer d’avantage votre capteur et va générer d’avantage de bruit électronique

  • Chaque photo prendra deux fois plus de temps à réaliser

  • Vos batteries vont se vider deux fois plus

Il faut donc désactiver la réduction de bruit pour les expositions longues.

h) Le volet oculaire

Lorsque vous faites une pose longue avec votre reflex, de la lumière peut rentrer par le viseur optique et gâcher vos photos. Pour éviter ça, il suffit de retirer l’œilleton du viseur et de mettre le volet oculaire à la place. Dans la plupart des cas, ce n’est pas nécessaire, mais si un jour vous prenez vos photos avec des sources de lumière derrière vous (lampadaire, voiture, etc.), cette petite astuce peut sauvez vos photos. (Si vous utilisez un hybride, ce problème n’existe pas puisque ce type d’appareil ne dispose pas d’un viseur optique).

i) Type de fichier

En astrophotographie, il est préférable de shooter en RAW. Ce type de fichier vous permet de faire des traitements bien plus avancés qu’en JPG et le résultat final est bien meilleur.

j) Réglage bonus

Une dernière chose, pensez à régler la luminosité de votre écran LCD au minimum, vos yeux seront adaptés à l’obscurité et vous n’aurez pas besoin d’un rétroéclairage fort. De plus, vous viderez moins vos batteries ainsi. 

 

Conclusion

Nous voici à la fin de ce premier article sur l’astrophotographie, j’espère que vous avez tout compris et que vous êtes maintenant prêts à photographier le ciel nocturne ! Si vous avez des questions, vous savez où les poser. Commentez et partagez l’article, bonne photo et à bientôt pour de nouvelles aventures ! 

Informations complémentaires :

On peut faire modifier un appareil photo pour l’astrophotographie. On appelle cette pratique le défiltrage et j’explique le principe de cette modification dans mon article sur le matériel nécessaire pour photographier les nébuleuses. Pour plus d’informations sur ce sujet, vous pouvez consulter ces sites web :

 

Sources :

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